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Avr 7 25

 LA PRESOMPTION DE DEMISSION – Analyse des premières décisions jurisprudentielles

La présomption de démission a été introduite par l’article L. 1237-1-1 du Code du travail, issu de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, dite « loi Marché du travail ». Ce mécanisme, entré en vigueur depuis le 19 avril 2023 suite à la publication du décret d’application n° 2023-275 du 17 avril 2023, vient de faire l’objet des premières applications jurisprudentielles.

La présomption de démission s’applique lorsqu’un salarié abandonne volontairement son poste sans justification et ne reprend pas son travail après une mise en demeure écrite de l’employeur. Ce mécanisme vise à simplifier la gestion des abandons de poste en permettant à l’employeur de rompre le contrat de travail sans avoir à effectuer une procédure de licenciement classique.

Concrètement, l’employeur doit adresser une mise en demeure au salarié, généralement par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge, fixant un délai de réponse minimum de 15 jours. Si, à l’issue de ce délai, le salarié ne justifie pas son absence ou ne reprend pas son poste, il est présumé démissionnaire.

La présomption de démission est une présomption simple, ce qui signifie qu’elle peut être renversée par le salarié. Celui-ci peut contester la rupture devant le conseil de prud’hommes, qui devra statuer dans un délai d’un mois. Parmi les motifs légitimes pouvant empêcher l’application de la présomption, les juges reconnaissent notamment :

  • Des raisons médicales (maladie ou accident) ;
  • L’exercice du droit de grève ou du droit de retrait en cas de danger grave et imminent ;
  • Le refus d’exécuter une instruction contraire à la réglementation ;
  • Une modification unilatérale du contrat de travail par l’employeur 

Remarque. Le salarié peut faire valoir un motif légitime d’absence, notamment : exercice du droit de retrait en cas de danger ou du droit de grève, raison médicale, refus d’exécuter une instruction contraire à la réglementation ou d’une modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur

Dans cette affaire, l’employeur avait initié une procédure de présomption de démission à l’encontre d’un salarié ayant abandonné son poste sans explications. Le salarié, invoquant des problèmes de santé, a contesté cette décision devant le conseil de prud’hommes. Les juges ont estimé que le salarié avait effectivement justifié son absence par un motif légitime, rendant inapplicable la présomption de démission.

Dans une autre affaire, un salarié a contesté sa présomption de démission en invoquant un manquement de l’employeur (refus de respecter les conditions contractuelles). La cour d’appel a jugé que, faute de preuve d’un abandon volontaire du poste, la rupture devait être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cela a conduit à la condamnation de l’employeur à payer des dommages et intérêts.

S’il est reconnu comme démissionnaire, il perd son droit aux allocations chômage.

En cas de contestation réussie, la rupture peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à des indemnités pour le salarié.

La procédure de mise en demeure doit être respectée strictement, sous peine de voir la rupture requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur doit s’assurer qu’aucun motif légitime justifiant l’abandon de poste ne peut être invoqué par le salarié.

Deux ans après son entrée en vigueur, la présomption de démission continue de susciter des interrogations. Si elle permet de simplifier la gestion des abandons de poste, elle impose aux employeurs une vigilance accrue dans le respect de la procédure et dans l’analyse des motifs d’absence invoqués par les salariés.

Les premières décisions judiciaires montrent que les juges restent attentifs à protéger les droits des salariés en encadrant strictement l’application de ce dispositif. Cela souligne l’importance pour les employeurs de bien documenter chaque étape de la procédure et pour les salariés de réagir rapidement en cas de mise en demeure.

En définitive, ce mécanisme doit trouver un équilibre entre la préservation des intérêts des entreprises et le respect des droits des salariés. Les évolutions jurisprudentielles à venir permettront sans doute de préciser davantage les contours de ce nouveau dispositif

Sources :

C. trav. L. 1237-1-1

Cons. Prud’h. Lyon 21 fév. 2025 n° 23/02471.

CA Paris, pôle 6 ch. 2, 6 mars 2025, n° 24/02319